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Il y a lieu d’examiner la hauteur et la forme des pieds de la ruche : les deux ont leur importance.
Et d’abord la hauteur. Les apiculteurs donnent souvent beaucoup d’élévation aux supports de leurs ruches. L’amour du bien-être l’emporte sur tout. Ils ne veulent pas avoir à se baisser. Or, j’estime qu’on ne doit visiter les colonies que rarement, plus rarement qu’on ne le fait généralement.
Par conséquent, c’est un sacrifice diminué que je demande à mes lecteurs, et non sans raisons sérieuses, quand je leur conseille de placer leurs ruches à 0,10 ou 0,15 du sol.
Placées sur un support élevé, les ruches ressentent davantage les variations de température et les coups de vent.
L’achat ou la fabrication de ces supports constitue d’ailleurs une dépense importante. J’ai vu de ces supports formés, d’une charpente telle que son bois aurait suffi à construire un corps de ruche à double paroi.
Je sais bien qu’on pourrait faire là une économie si on se servait de deux légères poutrelles en bois ou en fer. Ces poutrelles seraient supportées de distance en distance par une légère maçonnerie ; elles auraient d’ailleurs la longueur de tout le rucher. Les colonies pourraient y être placées à 0,75 de distance, de centre à centre. Malheureusement, cet arrangement a les inconvénients du rucher couvert. Dès qu’on touche à une colonie, toutes les autres s’en aperçoivent et se mettent en bruissement. Il y a donc à chaque visite d’une ruche une consommation de miel intempestive, parfois une excitation au pillage, à la colère.
L’élévation exagérée des ruches fait aussi perdre beaucoup de butineuses. Il n’est pas rare que ces courageuses ouvrières arrivent trop chargées, manquent l’entrée de la ruche et tombent sur le sol. Elles ne remonteront que difficilement dans une ruche élevée.
On peut mettre, il est vrai, une large planche allant du sol à l’entrée de la ruche. C’est une dépense nouvelle qui n’empêchera pas que bien des abeilles tombent encore à côté.
On pourra dire aussi que l’élévation de la ruche la garantit, elle et sa colonie, contre l’humidité de la terre et des herbes. Or, j’estime qu’il ne doit jamais se trouver d’herbes autour des ruches. Les herbes sont le tombeau des abeilles. Qu’une abeille y tombe chargée de son butin, elle y trouve l’ombre, la fraîcheur et bientôt le froid, mais rien pour la réchauffer et la ranimer. Sur le sol nu, au contraire, l’abeille pourra recevoir les rayons du soleil jusqu’au dernier, elle aura souvent le temps de se reposer assez pour pouvoir regagner sa ruche.
Mais l’humidité du sol ! Une ruche, placée à 0,10 du sol, sera parfaitement garantie de cette humidité, si les herbes sont enlevées, et si le plateau de la ruche ne contient aucune ouverture pour l’aération par le dessous.
Évidemment, les pieds bas rendent plus facile la rentrée des abeilles égarées autour de la ruche.
Il suffit donc et il est préférable de ne donner aux supports de ruches qu’une élévation de 0,10.
Mais quelle forme donner à ces supports ? Il ne faut pas penser à employer des poutrelles qui supporteraient plusieurs ruches. Nous en avons donné les raisons précédemment. On vend des pieds en fonte. Avec ces pieds, le plateau des ruches est bien isolé du sol, mais ces pieds ont le défaut d’exiger encore l’emploi d’une tuile, car seuls ils s’enfonceraient dans la terre.
Nous avons perfectionné ce pied. Il se termine en forme de patte de canard ; il ne peut s’enfoncer dans la terre, il simplifie les manipulations, il augmente la base de la ruche.
Nous avons créé aussi un pied en bois qui a les mêmes qualités que le pied en fonte, sauf la solidité. Il est toutefois plus économique et peut être fait sans outillage spécial avec des chutes de bois.
On peut remplacer ces pieds par une brique creuse.
Cette brique, qui a d’ailleurs 0,11 sur ses quatre faces, isole bien le plateau et elle est peu coûteuse. On pourrait remplacer cette brique creuse par deux briques ordinaires superposées à plat. Mais ces briques laisseraient monter quelque peu l’humidité et exigeraient plus de main-d’œuvre. Il faudrait d’ailleurs les retourner de temps en temps. Évidemment, ces briques ne simplifient pas le travailcomme notre pied en fonte.
Le plateau a pour but de fermer la ruche par le bas, tout en permettant l’entrée des abeilles d’une part, d’autre part l’entrée de l’air pur.
Avec quel bois faut-il fabriquer le plateau ? Plus le bois sera épais, plus le plateau aura de durée. Toutefois, si le bois est très épais, le plateau sera lourd à manœuvrer ; si le bois est très mince, le plateau ne résistera pas longtemps aux intempéries, aux chocs qu’il recevra.
Une épaisseur de 0,015 à 0,02 est une bonne et suffisante épaisseur, d’autant plus que le plateau est renforcé de tasseaux en dessous.
Que doit être l’entrée des abeilles ? On lui a donné en longueur toute la largeur de la ruche, en hauteur 0,01 à 0,02. Je suis d’avis que cette longueur, qui passe 0,40 dans certaines ruches, est nuisible dans bien des cas. Dans le cours de l’été, la population peut diminuer et ne plus pouvoir se défendre sur un tel front. Les partisans des grandes entrées diront qu’ils les diminuent quand c’est nécessaire or, ils peuvent oublier cette surveillance. En tout cas, c’est un travail supplémentaire que nous ne voulons pas. Ce n’est donc pas sans raison que nous avons donné à l’entrée de la Ruche Populaire les dimensions suivantes : 0,12 x 0,015. Mais nous tenons à faire observer que nous préférons cette dimension à celle de 0,20 x 0,01 quidonnerait cependant le même passage, mathématiquement parlant. Avec une entrée de 0,12 x 0,015, les abeilles ont moins de parcours à faire ; une colonie faible s’y défendra donc plus facilement.
Bien entendu, en hiver, nous réduisons encore cette entrée. Une portière métallique ne laisse qu’une ouverture de 0,07 x 0,0075, pour empêcher le passage des rongeurs. En hiver, il n’y a pas d’ailleurs de sorties d’abeilles en nombre. Cette ouverture ne sert pour ainsi dire qu’à l’aération de la ruche.
L’ouverture de 0,12 x 0,015 est d’ailleurs suffisante pour le passage des abeilles, même d’une forte colonie. Il suffit, pour le constater, d’examiner le va-et-vient des abeilles en pleine miellée. Cette ouverture est aussi suffisante pour l’aération de la ruche : passage de l’air nouveau qui remplace l’air léger qui s’en va par le haut. N’oublions pas qu’une ruche, même en été, ne contient pas plus de 30 à 35 litres d’air. Pour livrer passage à un tel cube d’air, il n’est pas nécessaire d’avoir une ouverture considérable, d’autant plus que ce cube d’air n’est pas à renouveler sans raison. Nous en reparlerons à l’article : « Aération de la Ruche ».
Pourquoi alors établir des ouvertures grillagées dans le plateau, laisser des ouvertures en face de l’entrée au-dessus du plateau ? Toutes ces ouvertures compliquent la construction de la ruche et augmentent son prix de revient. Elles sont inutiles puisque l’entrée dont j’ai parlé précédemment suffit à l’aération de la ruche. Par ailleurs, elles sont nuisibles.
L’ouverture faite en face de l’entrée au-dessus du plateau rend plus difficile la défense de la colonie. Elle peut aussi former un courant d’air qui, en hiver, détacherait des abeilles du groupe et lesvouerait à une mort certaine sur le plateau.
L’ouverture dans le plateau est toujours un dépôt de débris de cire et d’abeilles mortes, une cachette sûre pour les insectes et surtout la fausse teigne. Cette ouverture permet à l’humidité du sol de monter plus facilement dans la ruche. Or, il y a toujours trop d’humidité dans la ruche.
Quand on examine les différents systèmes de ruches, on voit que le plateau est toujours fixé au corps de ruche et par des modes bien différents.
Ces plateaux sont toujours difficiles à nettoyer, même dans les ruches qu’on dit automatiques.
Pour notre Ruche Populaire, nous préférons le plateau dont nous avons donné la description.
Le corps de ruche se compose de deux hausses, faciles à manœuvrer. Sans découvrir ces hausses, on peut les enlever, les placer sur des tasseaux et ensuite s’occuper librement du plateau : le nettoyer, vérifier s’il est de niveau, nettoyer la terre au-dessous du plateau.
On replace ensuite les deux hausses sur le plateau. Il n’y a pas danger d’écrasement d’abeilles ni de refroidissement du couvain.
On appelle chambre à couvain, dans une ruche, la partie qui abrite la colonie et les provisions en hiver. Ici, la chambre à couvain est formée de deux hausses.
Il importe de considérer principalement le volume de la chambre à couvain, car son volume doit être aussi réduit que possible pourréduire la consommation des provisions, car l’abeille mange pour se nourrir, mais aussi pour se chauffer. Or, les chambres à couvain varient de 36 litres, comme dans la Ruche Populaire, à 55 litres, comme dans la ruche Dadant.
De toute évidence, l’abeille consommera plus dans une grande chambre à couvain que dans une petite. J’ose même affirmer que la différence est de 3 à 5 kg. Et ceci chaque année. C’est pour l’apiculteur une perte qui doublera vite le prix de sa ruche.
La grande ruche aura aussi l’inconvénient de retenir l’abeille à la ruche aux premiers beaux jours, à un moment où elle pourrait trouver au dehors beaucoup de pollen et un peu de miel. Les grandes ruches ne font donc pas les fortes colonies ; elles n’ont d’action sur la fécondité des reines que pour en retarder la manifestation.
On peut placer, sans doute, dans les grandes ruches, des partitions qui en font varier la dimension. Or, ces partitions ont de nombreux inconvénients.
À l’automne, elles empêchent la libre disposition des provisions hivernales. Si elles ne closent pas, elles sont inutiles ; si elles closent, elles sont collées par la propolis et exigent une secousse violente chaque fois qu’on les déplace. Or, à la violence, les abeilles répondent par la violence. D’ailleurs, tout déplacement des partitions sera pour l’apiculteur un passe-temps, pour la chambre à couvain une cause de refroidissement, comme pour les abeilles un nouveau motif de mécontentement.
Le volume de la chambre à couvain, toutefois, doit être suffisant. Il doit permettre le logement du miel pour les provisions hivernales, le logement des abeilles au-dessous du miel, la ponte de la reine auprintemps.
Mais il est à noter qu’en hiver et au premier printemps, les besoins de l’abeille sont sensiblement semblables dans toutes les ruches, parce que les colonies diffèrent peu de force. Le diamètre de groupe d’abeilles ne varie guère que d’un ou deux centimètres d’une ruche à l’autre.
Or, l’abbé Voirnot, qui a le plus étudié cette question, a conclu que 100 décimètres carrés de rayons suffisent en hiver et au premier printemps.
Le docteur Duvauchelle, notre premier maître en apiculture, convaincu que les petites ruches sont préférables, avait créé une ruche contenant 8 cadres de 0,28 x 0,36, donc 80 décimètres carrés de rayons. Plus tard, il a agrandi sa ruche et lui a donné 8 cadres de 0,30 x 0,40, donc 96 décimètres carrés de rayons. C’était l’approbation des conclusions de l’abbé Voirnot. Nous-même avons constaté que ces deux maîtres avaient raison sur ce point.
Les rayons peuvent être mobiles ou fixes. Ils sont dits mobiles quand ils sont renfermés dans un cadre de bois, comme dans les ruches modernes. Mais il faut bien noter qu’ils ne restent vraiment mobiles qu’à la condition qu’ils soient nettoyés tous les ans.
Les rayons sont dits fixes quand ils ne sont pas entourés de bois et parce que les abeilles les fixent aux parois des hausses. Parce qu’ils sont fixés avec de la cire, ils sont de fait plus mobiles que les rayons mobiles fixés avec de la propolis.
Nous avons préféré le rayon fixe pour plusieurs raisons : d’abord le cadre est coûteux et, nous l’avons dit, souvent inutile. Ensuite le cadre augmente le volume de la chambre à couvain. Nous avions précédemment deux Ruches Populaires, l’une à cadres et l’autre à rayons fixes. Les deux avaient le même nombre de décimètres carrés de rayons. Or, la ruche à cadres avait une contenance de 44 litres, la ruche à rayons fixes une contenance de 36 litres, car les cadres agrandissent la ruche. Or, nous l’avons dit précédemment, les grandes chambres à couvain sont nuisibles à l’abeille et à l’apiculteur. Dans la ruche à cadres, nous avions une consommation hivernale de 3 kg en plus que dans la ruche à rayons fixes.
Les rayons peuvent être différents aussi par leur forme. Ils peuvent avoir une forme basse comme dans la Dadant, ou une forme haute comme dans la Layens, ou une forme carrée comme dans la Voirnot.
Dans beaucoup de ruches vulgaires où l’abeille a vécu pendant des siècles, nous trouvons fréquemment une largeur de 0,30 avec une hauteur variant de 0,60 à 0,80. Le cadre Layens et le cadre Congrès haut nous ont donnés de bons résultats ; ils ont une largeur de 0,31 et de 0,30. La largeur de 0,30 permet d’ailleurs d’établir une chambre à couvain carrée. Or, la forme carrée, après la forme cylindrique, contribue à bien répartir la chaleur dans la ruche. Cette largeur permet aussi de donner à la ruche une forme allongée comme celle du groupe d’abeilles ; elle permet également aux abeilles de placer le miel au sommet de la ruche, de se loger elles-mêmes au-dessous du miel en faisant pénétrer la tête de leur groupe dans le stock de miel, comme notre tête pénètre dans notre chapeau. Or, c’est là la meilleure disposition pourl’hivernage.
En hiver, dans le groupe d’abeilles, il n’y a de véritable vie qu’au sommet et au centre, car là seulement il y a une chaleur suffisante. Autour du groupe, les abeilles sont engourdies, à demi mortes.
Toutes les abeilles, il est vrai, passent à leur tour au centre du groupe pour s’y réchauffer et s’y nourrir. Mais elles n’auraient pas la force de s’éloigner du groupe. C’est ce qui explique comment les abeilles, sur des cadres bas et longs, peuvent mourir de faim à côté de provisions abondantes. Pendant les froids, elles ne se déplacent pas facilement horizontalement, soit de cadre à cadre, soit même sur le même cadre. Mais, par contre, elles se déplacent facilement verticalement, de bas en haut, puisque ce déplacement les conduit vers la chaleur qui est toujours plus forte au sommet de la ruche.
L’abbé Voirnot avait pensé qu’il fallait relever le cadre Dadant. Mais il s’est arrêté au cadre carré de 0,33, parce qu’il a attaché une importance considérable au cube de la chambre à couvain. Le cube de la ruche au dehors peut être pris en considération, parce qu’il diminue la surface de la ruche et par conséquent le rayonnement.
Or, le rayonnement est minime à l’intérieur de la ruche. Ce qu’il importe de considérer avant tout dans la chambre à couvain, c’est la chaleur qui s’y trouve enfermée. Or, cette chaleur s’y présente par couches superposées, d’autant plus chaudes qu’elles sont plus élevées. Or, ces mêmes couches de chaleur seront d’autant plus épaisses qu’elles seront moins larges, elles réchaufferont donc d’autant plus d’abeilles que le rayon sera moins large.
Supérieur en hiver, le rayon haut l’est encore au printemps. Quand une colonie allonge son groupe de couvain d’un centimètre, elle doit chauffer ce centimètre sur toute sa surface. Elle devra donc chauffer 2000 centimètres cubes dans la ruche Dadant ; elle n’aura que 900 centimètres cubes à chauffer dans la Ruche Populaire. Voilà pourquoi j’ai adopté pour le rayon une largeur de 0,30 et deux hauteurs de 0,20. Ces deux hauteurs superposées ont tous les avantages d’une hauteur unique de 0,40. Cet agencement, toutefois, donne un vide de 13 millimètres entre les hausses. Ces 13 millimètres comprennent les 9 millimètres du porte-rayons et les 4 millimètres de vide laissés par les abeilles au bas des rayons, soit l’épaisseur du corps de l’abeille, car l’abeille, en travaillant le ventre en l’air, ne peut prolonger le rayon là où se trouve son corps.
Ce vide convient aux abeilles en hiver, parce qu’il facilite les communications dans le groupe des abeilles. Si ce vide n’existait pas, les abeilles établiraient elles-mêmes des passages à travers les rayons comme elles en établissent dans les cadres des autres ruches.
Toutefois, je considère ce vide comme un défaut, puisque les abeilles doivent le chauffer à peu près inutilement au printemps. Défaut unique et d’ailleurs minime à côté des avantages que procure cet agencement, défaut moindre même que celui des ruches modernes, où les abeilles doivent chauffer inutilement des espaces bien plus considérables.
D’ailleurs, pour éviter des difficultés à l’apiculteur au moment de la régularisation des provisions hivernales, comme pour éviter aux abeilles la multiplicité de ces vides au milieu de la chambre à couvain, j’ai adopté des rayons de 0,20 et non des rayons plus bas,comme on le fait généralement pour les ruches à hausses, dites ruches divisibles.
Si le rayon haut a de grands avantages pour l’hivernage et même pour le premier printemps, il peut avoir des inconvénients en été. S’il reste une partie des provisions, s’il y a eu quelques petits apports de miel, il pourra se trouver en haut du rayon une bande de miel. Or, les abeilles ont une grande répugnance à passer sur le miel. Elles monteront difficilement dans la hausse et préféreront souvent essaimer. Voilà pourquoi les hausses sont plus vite occupées dans les ruches à cadres bas.
Dans la Ruche Populaire, nous avons les avantages du cadre haut sans en avoir les inconvénients, parce que l’agrandissement se fait par le bas.
Si une petite chambre à couvain suffit aux abeilles en hiver et au premier printemps, en été il leur faut une ruche plus grande comprenant la chambre à couvain et en plus une ou plusieurs hausses. Avec la Ruche Populaire, nous considérons qu’une troisième hausse supplémentaire est un minimum. Nous avons eu des colonies qui occupaient sept hausses.
Le nombre de hausses nécessaires varie avec la richesse mellifère de la région, avec la fécondité de chaque reine. Il est donc prudent d’avoir à sa disposition quelques hausses supplémentaires, surtout dans les petits ruchers. Dans les grands, il y a toujours quelques ruches vides dont les hausses sont disponibles.
La Ruche Populaire est donc une petite ruche en hiver ;mais en été elle peut être une ruche aussi grande que les plus grandes.
Il est à noter que les hausses sont placées l’une sur l’autre sans aucun emboîtement. On pourrait les fixer au plateau et entre elles par quelque article de quincaillerie ou simplement par deux pointes réunies par un fil de fer, et cela sur deux ou trois faces. Sauf le cas de déplacement, ces mesures sont inutiles. Le poids des hausses ne permettra pas au vent de les déplacer. Les abeilles les fixeront d’ailleurs avec leur propolis.
Les parois les plus hygiéniques sont celles du vieux panier cloche, en paille ou en osier, recouvert d’un enduit. Ces parois sont chaudes en hiver, fraîches en été, en tout temps perméables. Elles ne retiennent pas l’humidité. Elles atténuent les variations de température. En pratique, parce que nous avons besoin de régularité et d’une forme carrée, nous donnerons la préférence au bois. Le bois nous demandera moins de surveillance et d’entretien. Car les insectes se réfugient souvent dans la paille, les rongeurs l’attaquent plus facilement.
Le bois, lui, est plus résistant aux insectes, aux rongeurs et aux intempéries. Une couche de peinture blanche à l’huile est d’ailleurs vite donnée sans qu’un transvasement soit nécessaire.
Nous nous arrêterons donc aux parois en bois, de 0,024.
Une épaisseur de 0,02 est suffisante. Une épaisseur de 0,024 lui est préférable au point de vue solidité seulement. Avec cette épaisseur le bois joue moins. D’ailleurs, dans ces ruches les abeilles sortent plus vite le matin parce qu’elles sentent plus vite la chaleurambiante.
Des parois plus épaisses augmentent le poids de la ruche et son prix de revient.
Les parois doubles ont les mêmes inconvénients. D’ailleurs, il est presque impossible d’y maintenir l’air enfermé, pour qu’il soit isolateur et utile.
Les matières isolantes qu’on peut mettre entre deux planches sont souvent coûteuses ; elles prennent parfois l’humidité et cessent d’être isolantes.
D’ailleurs, les parois isolatrices n’atteignent pas le but qu’on poursuit. Au printemps, elles retardent la sortie des abeilles. En hiver, elles n’économisent pas les provisions, au contraire. Les abeilles consomment moins si elles sont engourdies par le froid que si elles sont maintenues en activité.
Certainement en temps de neige, un rayon de soleil fera sortir quelques abeilles des ruches à parois minces, plus que dans les ruches à parois épaisses. Certaines resteront sur la neige ou sur la planchette de vol et y mourront. Le groupe de plusieurs milliers d’abeilles n’en sera pas sensiblement diminué. D’ailleurs, ces abeilles qui ne sont pas rentrées sont très probablement des faibles, des vieilles, des inutiles.
Certainement, si les ruches à parois simples sont plus sensibles à la chaleur ambiante du jour, elles sont aussi plus sensibles à la fraîcheur de la nuit. Mais pendant la nuit la présence des abeilles compense le manque de chaleur.
Et n’oublions pas que le confort détruit les races, que l’effort, comme l’a dit Pourrat, est la condition de la vie, la difficulté son climat.
Théoriquement, le bois blanc est préférable. Malheureusement,il joue trop. Dans la pratique, nous préférons le sapin du Jura.
Certains préconisent l’assemblage à mi-bois. Nous lui préférons l’assemblage à plat. Il est beaucoup plus économique et ne demande pas un outillage de professionnel. Si on emploie des pointes de 60 à 70 mm et du bois un peu sec, on aura toute satisfaction.
En tout cas, nous préférons du bois raboté sur les deux faces, donc régulier, pour avoir de la régularité autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Sinon, la pluie s’arrêterait sur les parties saillantes et le nettoyage à l’intérieur serait plus difficile.
Le toit de la Ruche Populaire est disposé de façon à ce qu’il y ait dans son sommet un vide important. L’air circule librement et rapidement dans ce vide. Ce vide est d’ailleurs trop considérable pour qu’une toile d’araignée puisse y arrêter la circulation de l’air.
C’est sous ce genre de toit que j’ai constaté une température plus régulière, même quand la ruche est exposée au soleil.
J’ai eu l’occasion de voir sur le front, des constructions militaires légères. Le toit y était formé aussi de deux planches ou de deux tôles superposées. Un officier supérieur, qui avait habité longtemps les colonies, m’a dit que les tentes militaires étaient disposées aussi d’après ce même principe pour lutter contre le rayonnement du soleil.
La disposition de notre toit est donc bien établie selon les règles dictées par l’expérience.
On recouvre souvent le toit avec du carton bitumé. Je n’en suis pas partisan. C’est une dépense. D’ailleurs, le carton bitumé entretient souvent une humidité invisible qui pourrit la planche qui le supporte.
Je ne suis pas partisan davantage de la tôle. En temps de pluie ou de grêle elle produit un bruit suffisant pour exciter les abeilles. Elle est d’ailleurs plus sensible aux rayons de soleil.
Je préfère le bois peint. Une planche peinte tous les deux ou trois ans résistera longtemps et n’a pas les défauts du carton bitumé ni de la tôle. Mais là encore je préfère la peinture blanche qui rejette la chaleur. Le carbonyle, qui est certainement le meilleur conservateur du bois, ne convient pas à cause de son odeur et surtout de sa couleur.
Au-dessus de la hausse supérieure, nous plaçons une simple toile, que nous trouvons souvent dans des morceaux de vieux sacs.
Nous préférons cette toile à la toile cirée et aux planchettes. Les planchettes sont imperméables et exigent une pesée, une secousse, quand on veut les enlever. Les abeilles en sont irritées.
La toile cirée est imperméable et ne se déroule pas aussi bien que la simple toile.
Car, ne l’oublions pas, tout ce qu’on mettra sur la ruche est toujours propolisé, par conséquent adhérent à la ruche. Nous ne pouvons donc rechercher que la facilité de l’enlèvement.
Or, notre toile se déroule facilement. On la prend par un coin àgauche et on la tire horizontalement vers la droite. Dans cette opération, il n’y a pas de secousse et on ne découvre que la partie qu’on a besoin de visiter.
Toutefois, la qualité principale de cette toile c’est sa perméabilité, que les abeilles peuvent modifier, augmenter ou diminuer, en ajoutant ou en supprimant sur cette toile la propolis dont elles disposent toujours. Cette toile permet aux abeilles d’aérer elles-mêmes la Ruche Populaire comme elles le font dans la vieille ruche commune. Il est bon de renouveler souvent cette toile, dont on pourra d’ailleurs mettre utilement des parties dans le rouleau de l’enfumoir.
Le coussin a 0,10 de hauteur et non 0,05 comme les coussins ordinaires. Le dessous est fermé par une toile. Mais le dessus est libre. On le remplit de sciure de bois, de menues pailles, de tourbe, ou de toute autre matière légère, mauvaise conductrice de la chaleur et absorbante.
Le coussin n’étant pas fermé, on peut renouveler facilement son contenu ; en tout cas, le retourner souvent pour le maintenir sec, afin qu’il absorbe plus facilement l’humidité de la ruche et communique moins à la ruche la chaleur du dehors.
Quand on dispose de sciure, de menues pailles, on peut les renouveler chaque année. Si on étend les vieilles autour de la ruche, on empêche l’herbe d’y pousser.
Dans toute ruche, il y a de l’humidité produite par la vie animale et par l’évaporation du miel, il y a de l’air vicié par la respiration animale.
Cet air vicié et humide est chaud tant qu’il est dans le groupe des abeilles, il tend donc à monter. Arrivé au sommet de la ruche, il ne se refroidit pas vite, parce que le sommet de la ruche est toujours chaud et parce que les parois de la Ruche Populaire ne sont jamais très froides, en raison du peu de distance entre elles et le groupe d’abeilles. Cet air vicié persisterait donc à occuper le sommet de la ruche, mais la toile le laisse passer et se répandre dans le coussin.
Cet échappement d’air vicié appelle un autre air qui entre par l’entrée. Comme cet échappement est continuel et à la volonté des abeilles, l’air nouveau n’entre que lentement mais continuellement, pour le renouvellement de l’air de la ruche et sans incommoder les abeilles.
Dans les autres ruches, cette aération ne se fait pas de la même manière. L’air vicié et humide est vite arrêté par la toile cirée et les planchettes et il continue d’entourer les abeilles, car dans les ruches plus larges que la Populaire, les abeilles sont plus rapprochées du sommet.
Cet air vicié s’étend jusqu’aux parois et se condense à leur contact parce que ces parois, plus éloignées du groupe d’abeilles, sont aussi plus froides que les parois de la Populaire.
Condensé, cet air humide descend le long des parois et des rayons extrêmes et y provoque la moisissure et la pourriture.
L’entrée de la ruche peut être très grande, l’air nouveau nepénètre pas dans la ruche, parce qu’il n’y est pas appelé par la sortie de l’air vicié. L’aération dans ces ruches est nulle ou insuffisante.
Depuis quelque temps, j’ai vu qu’on avait donné le conseil de percer une ouverture de plusieurs centimètres dans les planchettes qui recouvrent la ruche. C’est certainement un moyen radical d’éviter la moisissure des cadres et des parois ; mais on se demande comment des apiculteurs ont l’audace de donner de semblables conseils. Cette ouverture est trop grande pour pouvoir être fermée par les abeilles. D’ailleurs, on conseille de les en empêcher. Les abeilles ne peuvent non plus modérer l’échappement de l’air par cette ouverture. Il y a donc par cette ouverture un courant d’air continuel pendant toute la mauvaise saison : ce ne peut être qu’aux dépens de l’hygiène des abeilles et de leurs provisions.
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Notre portière est d’une grande simplicité. On peut la prendre dans une boite de conserve vide. Elle est d’un maniement facile et rapide. Elle peut diminuer instantanément, sans écrasement d’abeilles, l’entrée de la ruche et lui donner à volonté une entrée de 0,07 x 0,0075 pour empêcher l’entrée des souris et musaraignes, ou une entrée de 0,006 x 0,006 ne permettant que le passage d’une abeille pour le cas de nourrissement, de danger de pillage.
Le porte-rayon a une largeur de 0,024. Nous préférons ne lui donner qu’une épaisseur de 0,009 afin qu’il ne déborde jamais la feuillure de la hausse qui a 0,010.
Par ailleurs, il est préférable que le porte-rayon ne soit pas raboté sur une face pour donner plus d’adhérence à la cire. Au contraire, il est préférable que les trois autres faces soient rabotées pour faciliter leur nettoyage. On pourrait même restreindre la propolisation de ces trois faces en les enduisant de vaseline ou d’huile.
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